Alliance de la plume, de la toge et de son bras armé.
Par Antoine Spohr
La BNU, (bibliothèque nationale universitaire), temple du livre ( la plume), héberge depuis le 18 juin une exposition organisée par la police judiciaire (PJ) de Strasbourg, qui dépasse largement la quête d’une reconnaissance par une opinion publique conjoncturellement divisée mais démontre que sans la force publique, le bras armé (ici la police et ses moyens modernes) la Justice (la toge) serait totalement démunie. Une formulation réductrice, certes un peu banale quand même emais qui rappelle celle, plus ancienne bien connue et obsolète, de « l’alliance du trône et de l’autel » ou celle encore plus métaphorique « du sabre et du goupillon » d’avant la République.
La célébration d’un centenaire.
La PJ de Strasbourg a eu cent ans l’an dernier ( retard en raison de la crise sanitaire),car c’est un décret publié au JO le 4 janvier 1920 qui a créé la 17° brigade mobile de Police Judiciaire. Un des 30 panneaux (le 1 en introduction) nous le dit :

Ces brigades sont celles dites du Tigre ( Georges Clemenceau)

Dans cet extrait on remarque que Strasbourg n’apparait qu’en 1920….pour cause de retour à la France qu’après la victoire de 1918 et elle est la 17°. On remarquera aussi qu’il est fait état de la dotation en véhicules motorisés qui ne supplantent pourtant pas les bicyclettes qui restent souvent attachés aux véhicules, les pannes étant fréquentes. On est loin, au début ,des « tractions-avant » de la bande à Bonnot.
Après cette introduction, sur 200m2 disponibles à la BNU, le contenu fait appel aux traditionnels panneaux illustrés, une trentaine portant sur la criminalité organisée, le terrorisme, les stupéfiants, le proxénétisme, la cybercriminalité, la délinquance économique et financière et à des astucieuses mises en scène avec l’aide et les prêts du TNS ( Théâtre National de Strasbourg) comme pour représenter une scène de crime 1920/2020, les archives des DNA, des mannequins en uniformes, les outils d’investigations ou d’identification aujourd’hui oubliés, une animation en vidéo-projection d’interviews de policiers retraités ou en activité, du vécu récent. Bien sûr la préfecture autorité de tutelle, avec ses services muséaux et les archives ont été mis à contribution.
Le tout a produit un fruit de grande qualité sans outrance sensationnelle, une belle sobriété avec une justesse de vue agréable sans sacralisation. C’est notre police, son histoire, ses hommes et ses femmes (plus tardivement), ses belles réussites et ses inévitables échecs. Une police indispensable, celle d’une république respectée, en principe.
A cette belle prestation, il faut ajouter des conférences de très haut niveau dont celle du Commissaire Général Charles Diaz que nous avons pu suivre, totalement subjugués, à la fois par la prestation « a capella » pourrait-on dire mais surtout par le fond intitulé « Clemenceau et l’invention d’une police républicaine » Plus d’une heure de monologue brillantissime sur le contexte dans lequel sont nées les Brigades du Tigre. Travail fascinant ! Truffé de détails importants, croustillants et pourtant peu connus.
Ce soir, même lieu ( la BNU) à 18H30 Jacques Fortier ancien des DNA et surtout romancier traitera de « la PJ dans le roman policier » Là encore on attend, serein, encore une autre performance avant la clôture demain soir de cet événement qui a réussi une osmose souvent tenue pour improbable entre la police et la justice avec la complicité des belles lettres Vite, courrez-y vite.
Antoine Spohr et Ibrahim Bekbuzarov
Nous remercions particulièrement le capitaine de police Olivier Gausserand, officier chargé de la communication pour les bons tuyaux et le temps qu’il nous a consacré
Notons aussi que depuis le 1° janvier, la PJ de Strasbourg est devenue « Direction Zonale de Police Judiciaire » DZPJ et qu’elle couvre largement l’Est avec ses implantations à Auxerre , Besançon, Dijon, Metz, Mulhouse, Nancy et Reims.