par Han-Ul Cheng
Alors que le monde entier se voit confiné, il reste d’irréductibles coréens luttant contre l’envahisseur, et toujours contre le confinement. Ce “petit” pays d’environ 50 millions d’habitants impressionne dans sa gestion de la crise du Covid 19, alors qu’il était, au début de la crise, le 2e pays le plus touché par le virus (derrière la Chine).
Au pays du matin calme, la vague tant redoutée n’a pas déferlé et cela, grâce à une mentalité et une stratégie qui montrent chaque jour leur efficacité. Dans ce contexte, il est possible de faire le parallèle avec les autres pays, et de constater leurs limites dans leur lutte face au Coronavirus. Cela permettrait, peut-être à la Corée, une montée en puissance en tant qu’un des prochains leaders mondiaux dans ce domaine pour commencer.
Quand les masques tombent …
Dès l’apparition des premiers cas positifs au Covid en Chine, le gouvernement Sud-Coréen a mis immédiatement en alerte sa population ainsi que son service médical à se préparer à la pire des catastrophes. En effet, bien aidés parses expériences face au SARS (2002-2004) et au MERS 2015), dont le premier provenait de Chine, la Corée du Sud a envisagé des scénarios de crise sanitaire important face à ce nouveau Coronavirus. Ainsi, les dirigeants ont fait preuve d’honnêteté et de transparence dans leur communication afin d’avoir la confiance de ses citoyens, discipline et mentalité de la population aidant merveilleusement. Transparence8. Voilà un terme qui est régulièrement revenu dans la bouche des dirigeants européens, encore lundi soir danq celle du Président Macron, et qui aujourd’hui semble être un mot filtré par un masque… invisible. Car s’il y a bien un sujet qui a fait polémique,et preuve du manque de transparence, c’est bien la question des masques.
D’un côté il y a eu le discours, repris par la majorité des dirigeants occidentaux comme l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur l’inefficacité des masques, et de l’autre côté, les citoyens Sud-Coréens se sont rués dans toutes les bonnes boutiques pour acquérir des masques. Une ruée ver“l’or” qui a conduit à la chaine coréenne JTBC à faire une immersion pour savoir le temps que mettait un citoyen pour se procurer un masque. La réponse : environ une demi-heure de recherchepour obtenir 5 masques. Des attitudes divergentes qui posent question auprès des citoyens du reste du monde, ne sachant plus qui écouter. Dans ce climat, il faut aussi relever la preuve d’une certaine arrogance de la part des Nations occidentales prévnues de l’arrivée du Covid à leurs frontières.
Combien de fois a-t-on entendu de la bouche des médias et des citoyens, qu’il s’agissait d’une grippette ou bien que le virus n’atteindrait jamais leurs territoires ? Trop de fois. Ou encore de déclarations orgueilleuses venant du dirigeant qui à l’heure actuelle est numéro 1 des cas détectés.
En cela l’Histoire à tendance à se répéter ; il faut attendre que la crise arrive pour agir, et non se préparer à la crise. Depuis, de nombreux pays comme l’Allemagne ou l’Uruguay souhaitent adopterle “modèle coréen”.
Une stratégie chloroquinelesque
Une situation croquignolesque que cette “guerre”. Car en temps de guerre, il faut une stratégie, et personne ne peut se prétendre le Clausewitz des temps modernes. Certains préfèrent la stratégie du tâtonnement, tandis que d’autre préfère celle de l’immédiateté. La Corée du Sud a réalisé des tests en masse, avec leurs fameux Drive afin de détecter et de “confiner” rapidement les cas positifs. Elle fait également usage du Tracking qui est source de débats et de critique en dehorsdes frontières asiatiques, notamment sur la question des libertés individuelles. Alors, il estnécessaire de se poser ce raisonnement : lorsqu’un individu partage ses données privées (nom,prénom, âge, sexe …) avec les entreprises à “Pomme”, “3 étoiles” ou encore à “Brillante Action”,en plus des nombreuses photos et données GPS partagées sur les réseaux sociaux à “oiseau”, à “F”ou à “appareil photo” ; à ce moment-là il n’est plus question de libertés individuelles. Parconséquent, quand le citoyen ou la citoyenne « vend” ses données à ses réseaux c’est la liberté, maislorsqu’il s’agit de l’intérêt général et la vie humaine d’une population c’est être un “régime autoritaire” (la République de Corée du Sud n’est pas la Chine). Il faut rappeler que le Président de la Corée du Sud, Moon Jae-In a été longtemps avocat sur les questions des Droits de l’Homme. Le système étant même anonyme n’indiquant que l’âge et le sexe de la personne contaminée. De plus, des échos venant de Corée confirme que même les ressortissants étrangers vivant là-bas se sentaient davantage en sécurité avec ce système fiable que dans leurs pays d’origine. La belle affaire! Malgré tout, la mise en place d’un tel système en Europe semble trop tardif pour se montrer efficace, car il faut pour une efficience maximale, un mécanisme de test lui aussi tout autant efficace. Et à l’heure où il faut faire le bilan de l’efficacité (pour l’instant), au 13 avril, la Corée compte pour le moment:
10 537 (+ 25 nouveaux cas entre le 12 et le 13) cas positifs, 7447 personnes guéries et 217 décès.
Autre illustration d’une stratégie de tâtonnement, celle de l’usage ou non de la Chloroquine, dont les débats fleurissent en ce retour du printemps, en France. Il n’est pas question ici de trancher ce débat, car ce sont aux spécialistes de le faire, pas aux citoyens. Mais de montrer toute la tension qui règne et la difficulté de prendre des décisions, surtout lorsqu’un pays part en guerre avec un fusil sans cartouches. Concernant le cas de la Corée, elle n’utilise que très peu la Chloroquine,peu fiable encore selon les spécialistes nationaux et les conséquences des effets secondaires de cette dernière. Elle est parfois utilisée en dernier recours sur les patients. Et oui pour info, les professeurs coréens ont lu les rapports du Professeur Raoult, mais attendent encore davantage de certitudes.
Pour l’instant, il préfère utiliser le transfert de plasma de patients guéris, sur les 3 patients testés, 2 ont guéris et 1 est décédé, mais ce dernier était aussi atteint d’un cancer. De plus ll’effort est concentré surla conception d’un vaccin à laquelle Bill Gates a apporté son soutien financier. Des dernières informations, le vaccin Made in Korea contre le Covid pourrait être opérationnel au mois de juillet !
Vers un dérèglement géopolitique ?
La crise du Covid permet actuellement un bien fait écologique, avec une baisse de la pollution et le retour à l’état sauvage de certaines espèces, comme si la nature reprenait peu à peu son cours, et que le dérèglement climatique et écologique tendait à se stabiliser, car il est encore trop tôt pour parlerde régulation. Cependant, à la sortie de cette crise sanitaire pourrait suivre une crise sociale etéconomique, car le chômage partiel ne signifie pas activité et les longues semaines, devenues moisde confinement vont faire énormément de mal à l’économie européenne en générale et aux emplois.
Il se peut alors que le goût de la liberté ait un goût amer.
Ce sera le bon moment pour l’Europe de montrer sa résistance face aux crises et sa nécessité d’exister ; elle qui doit encore régler la question du Brexit. Et cette nouvelle crise pourrait profiter à l’Asie, et particulièrement à la Corée….duSud Car, le confinement bloque le développement de l’économie nationale des pays occidentaux et sont également dépendants des produits sanitaires d’Asie, notamment les masques, qui font l’objet de querelles aéroportuaires. Mais aussi, elle va pouvoir profiter des difficultés des autres pays voisins. Singapour a également décidé de se confiner, la Chine fait face à une nouvelle vague, et pourrait payer le fait d’avoir provoqué le virus. Quant au Japon, déjà en difficulté financière, devrait subir les conséquences économiques du reportdes Jeux Olympiques de Tokyo, mais commence également à découvrir la létalité grandissante du
Covid sur sa population, dont les autorités sanitaires ne sont pas prêtes pour lutter et dont la crainte est croissante. Toutes ces conditions pourraient permettre à la Corée du Sud d’avoir un boulevard pour accéder à un leadership mondial. Et quelle autre façon que de prouver ce leadership ? Lacontinuité de la vie démocratique. Les citoyens coréens ont voté le 15 avril lors des élections législatives avec comme seules règles : masques, gants, nettoyage et distanciation. Il semble bel et bien que la République de Corée du Sud soit “en marche”.
Han-Ul Cheng
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