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De Varsovie à Alexandrie : le voyage des sens

Par Amaury Grosrenaud

Rêve d’Orient

Sous un soleil igné, la capitale polonaise est baignée de chaleur. C’est encore le printemps mais la vie semble s’arrêter dans un bain de lumière et de parfums, celui des chaleurs estivales qui perd les esprits les entrainant dans les plus fous voyages. Alors cette fois, c’est l’orientalisme qui conquiert l’âme vagabonde. Ce mouvement artistique et littéraire qui fleurit tout au long des XVIII et XIXème siècles en Europe occidentale.

Leon Cogniet – L Expedition D Egypte Sous Les Ordres De Bonaparte, 1835

L’orientalisme c’est l’histoire d’une bourgeoisie qui « s’encroute » et se désespère d’un manque d’aventure. Les cultures turque et arabe présentées au public européen et en France notamment par Molière dans le Bourgeois gentilhomme, ou encore par les Contes des Mille et Nuits d’Antoine Galland -exemples éminemment représentatifs- avivent les passions pour un Orient fantasmé, entre interdit et poésie. Alors en remontant aux sources, on traverse la Méditerranée…

Campagne d’Egypte en voyage immobile

Antoine-Jean Gros – La Bataille des Pyramides, 1810

Alors, voyageons entre histoire et art, partons sur les traces de la « campagne d’Egypte » menée par le général Napoléon Bonaparte, la plus orientale de ses batailles. Nous sommes sous le Directoire, qui donne à cette campagne son impulsion initiale. Elle commence en 1798 et devra se terminer en 1801. Objectif ? Exercer un contrôle français non seulement sur l’Égypte et l’Orient afin de bloquer l’expansion de la route des Indes britanniques, mais aussi de collecter  les richesses culturelles et scientifiques égyptiennes. On sait (Champollion, Monge…)! C’est une importante flotte et environ 40.000 hommes et 10.000 marins qui embarquent ainsi à Toulon en direction de l’Égypte, alors province ottomane.

Le 2 juillet 1798 Napoléon Bonaparte arrive à Alexandrie et prend la ville. L’armée marche ensuite sur Le Caire pour affronter Mourad Bey, chef Mamelouk dirigeant cette milice d’esclaves affranchis normalement soumise aux différents souverains musulmans mais ici dissidents et donc rebelles opposés au sultan Sélim III, grand réformateur.

C’est la « bataille d’Embabech » le 21 juillet 1798 qui est décisive pour cette campagne. C’est là, en vérité, non loin des pyramides de Gizeh, que s’affrontent les meilleurs cavaliers du monde et le génie militaire français de Napoléon qui fait mettre les hommes en « carrés », une formation efficace contre la cavalerie, permettant d’ouvrir le feu de tous côtés sans être pris au dépourvu par un éventuel contournement. Les cavaliers sont rapidement mis en déroute et la victoire est acquise contre les Mamelouks. Seulement une trentaine d’hommes seront perdus côté français contre près de 20.000 Mamelouks. Exceptionnel et l’Egypte est conquise.

Et Kléber vint….et malheureusement passa… (souvenir prégnant pour un étudiant rêveur strasbourgeois)

Strasbourg – Statue du General Jean-Baptiste Kléber – Wikimedia Commons

Le commandement des armées est confié au général Kléber le 22 août 1799 alors que Napoléon s’apprête à regagner la France, rêvant lui aussi d’autres conquêtes à Paris.

Kléber alors à la tête de l’armée d’Orient voulant procéder à l’évacuation des troupes françaises vers les fronts européens, en dépit des instructions laissées par Napoléon, décide de conclure avec les Turcs et les Anglais la convention d’El Arish le 24 janvier 1800.

Il s’agit toutefois d’un échec car les Français seront trahis, les conditions de la convention n’étant pas respectées. Le général Kléber aurait alors eu cette phrase restée célèbre : « Soldats ! On ne répond à de telles insolences que par des victoires ; préparez-vous à combattre ». C’est dans cette configuration que s’amorce la bataille d’Héliopolis le 20 mars 1800. Malgré un désavantage numérique important, les forces françaises étant d’environ 11.000 à 12.000 hommes contre 60.000 du côté Ottoman, la victoire est aux forces tricolores. (Eh oui, çà vient de sortir en cocarde, quelques années avant)

L’emprise française est ainsi achevée et tout semble au mieux. C’est pourtant peu de temps après que Soleyman el-Halaby, un étudiant Kurde Syrien va assassiner le général Kléber d’un coup de poignard porté au cœur. L’armée d’Orient sera bientôt vaincue, mal commandée par le général Menou succédant à Kléber, qui devra concéder la victoire aux anglais le 31 août 1801. C’est la domination avortée de la présence française en Egypte.

Le soleil s’est couché sur la Vistule

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