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Après la défaite en Hesse, Merkel jette l’éponge.

Par Alain Howiller

Pour ceux, de plus en plus rares, qui se souviennent de la manière dont Angela Merkel avait été décisive dans la  mise en oeuvre de la chute  de Helmut Kohl, la décision de la chancelière de se retirer de la présidence de la CDU et d’abandonner la politique lors des prochaines élections générales en 2021 au goût de revanche tardive mais réelle!

Capture d_écran 2018-10-18 à 10.54.40Elle n’arrêtait pas de dire que le poste de Présidente de la CDU et celui de chancelière étaient liés et que l’un n’allait pas sans l’autre. Et voilà qu’Angela Merkel  vient d’annoncer qu’elle ne  briguerait plus la présidence de son parti lors du  congrès des démocrates chrétiens en décembre à Hambourg , mais qu’elle comptait bien rester chancelière et assumer cette responsabilité jusqu’au bout!

Après cette échéance, elle quitterait la politique, son mandat actuel de chancelière sera le dernier. Du coup il  n’est pas question qu’elle soit candidate, comme certains l’espéraient, à la succession de Jean-Claude Juncker à la tête de la Commission de Bruxelles et encore moins  qu’elle conduise une liste aux prochaines élections du Parlement Européen. Après les échecs enregistrés par  la mouvance chrétienne-démocrate en Bavière(CSU) puis, le 28 Octobre, en Hesse (CDU) que dirigeait son ami  et fidèle soutien Volker Bouffier , cette décision qu’on n’attendait pas réellement a éclaté Outre-Rhin comme un assourdissant coup de tonnerre dans un ciel d’automne!

En démocratie ce sont les urnes qui décident.

 

Certes malgré les pertes enregistrées par la CSU en Bavière (85 élus contre 101 lors des consultations régionales de 2013) et par la CDU en Hesse (40 sièges contre 47), le parti de Merkel et de Horst Seehofer (Bavière) pourra rester  au pouvoir puisque ,en Hesse, la CDU peut reconduire la coalition sortante avec les  Verts (20 sièges contre 14) et qu’en Bavière où la CSU n’aura plus la majorité absolue,elle peut conclure une coalition  avec un parti qui lui est ,somme toute ,assez proche : celui des Freie Wähler (FW). Toutefois il est à noter que, à la suprise générale, le parti des Verts a décidé , en Hesse, d’inviter les responsables du SPD et du parti libéral FdP  à des discussions en vue d’une éventuelle coalition : une démarche qui semble davantage destinée à obtenir un maximum de postes auprès de la CDU  dans une   coalition reconduite. En outre FdP et  Verts ont des positions opposées et tranchées dans plusieurs domaines stratégiques.

 

En route vers un « tsunami politique » ?

 

La décision de Merkel risque néanmoins de déclencher une sorte de tsunami politique qui à vrai dire s’est engagé concrètement, il y a quelques semaines ,lorsque la CDU a décidé de « débarquer » Volker Kauder , le « merkelien » Président du groupe au Parlement ,au profit de Ralph Brinkhaus ,président de la Commission des Finances du Bundestag. Kauder occupait le poste de président du groupe CDU depuis…13 ans ! La défaite de la CSU en Bavière et la perspective d’une nouvelle présidence à la tête de la CDU, ont apparemment donné des idées à la CSU dont le président Horst Seehofer est désormais sur la  sellette. « A l’origine de notre désastre il n’y a qu’un responsable: Horst Seehofer » se risque Michael Brand, chef du groupe CDU en Hesse, en commentant les querelles Seehofer/Merkel qui ont  failli  faire éclater la GROKO à deux reprises avant l’été!…

« Merkel a eu à coeur de décider en toute liberté de quitter son poste à la tête du parti : je souhaite que Horst Seehofer prenne la même   décision de  retrait » déclare Tobias Hans,Président du Land de Sarre. Cette opposition interne dont le Président du Land -Markus Söder- est proche, a amené Horst Seehofer, dont le mandat  à la tête de la CSU ne devrait expirer que fin 2019, à souligner qu’il ferait  des propositions de renouvellement de son parti d’ici à une quinzaine de jours. Il, accepte même  l’idée qu’il pourrait lui aussi quitter « sa »  présidence, « Plutôt que de devenir une sorte d’observatoire, de vigie, je préfèrerais partir » a-t-il affirmé!

Quand on aiguise les couteaux !

Comme  on  le voit les couteaux s’aiguisent dans l’ombre et les candidatures pour prendre la tête de la CDU ne sont pas rares.

Deux candidat(e)s se  détachent d’ores et  déjà : Annegret Kramp-Karrenbauer ,l’ancienne présidente de la Sarre que Merkel a poussée ,en février dernier, au secrétariat général de la CDU et  Friedrich Merz  .Ce dernier ne s’est pas présenté aux élections générales de 2009 alors qu’il était député sortant . Il avait alors choisi d’entrer dans le privé et, aujourd’hui,sa candidature paraît probable .

Et Ursula von der Leyen, Ministre de la Défense,qui a  été considérée pendant longtemps comme la « dauphine »  de Merkel ?

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Annegrete   Kramp-Karrenbauer

 

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Ursula von der Leyen

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Friederich Merz

 

 

 

 

 

 

Des noms et visages à retenir.

Reste à savoir dans ce tsunami, ce qui va se passer au SPD grand perdant des élections en Bavière, où il est au coude à coude avec le parti d’extrême droite AfD et en Hesse où il est voisin des  Verts.

Le SPD va-t-il risquer de provoquer des élections générales anticipées en quittant le GROKO? La situation du gouvernement a relancé ceux qui au SPD avaient manifesté leur opposition à la grande coalition avec la  CDU. Le SPD brisera-t-il la GROKO pour essayer de se relancer  alors que le parti est en perte de vitesse et risque de payer cher de nouvelles élections générales en cas de dissolution? Attendra-t-il une occasion favorable ou aura-t-il la patience de ne pas se résoudre à de nouvelles consultations électorales  avant le bilan  que la Grande Coalition doit faire à mi-mandat (fin 2019/début 2020) selon le contrat de gouvernement?

« Avant de nous décider, il ne va tout de même pas attendre qu’ils disent ce qu’ils comptent faire » lance M. Dreyer Présidente de Rhénanie-Palatinat.

La Secrétaire générale du SPD n’est pas franchement prête à relever ce défi et voudrait attendre ou le moment du bilan prévu à mi-mandat (2020) dans le contrat de coalition ou, en tous les cas, un moment plus favorable. Mais, là, les couteaux s’aiguisent aussi dans l’ombre et comme le disait le Président des jeunes socialistes (Jusos) Kevin Kähwert: « La moindre étincelle peut faire exploser le baril! »

Mais il y a un « risque » :celui qui a conduit Wolfgang Schaüble à affirmer qu’au cas où la GROKO s’effondrerait la CDU pourrait gérer seule, en parti minoritaire faisant alliance selon les cas avec l’un ou l’autre partenaire occasionnel voire trouver un nouveau partenaire?

En annonçant son retrait progressif , Angela Merkel avait commencé son allocution par : « Il est temps d’ouvrir un nouveau chapitre ».

On lira le…livre avec intérêt!

Alain Howiller

 

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