Bons plans

Le 20ème Chemin d’Art Sacré en Alsace.

Reflets de l’étape de Rosheim : un dialogue artistique décuplé.

On serait bien inspiré de commencer le cheminement 2017 par Rosheim, pour engager cette sorte de décalogue, reconduit pour la vingtième année, et reconductible à loisir pendant la période estivale jusqu’au début de l’automne, entre les œuvres picturales de dix artistes contemporains, sur le parcours balisé de dix beaux sites sacrés du Bas et du Haut-Rhin1.

Pleins feux donc, sur les œuvres de Sœur Marie-François Lin qui se donnent à voir et percevoir comme autant de « Reflets de la Création » aux passants ou regardeurs contemplatifs, en l’église romane Saints Pierre et Paul2, célèbre pour son architecture, ses bas-reliefs en volutes et son bestiaire romans.

Un choix d’œuvres « Reflets de la Création »

Outre la quinzaine d’œuvres picturales de Sœur Marie-François Lin, l’église romane de Rosheim, abrite depuis le 14 juin 2017, date du vernissage de l’exposition, à la fois la trilogie sandales – bâton – couverture de lin d’une artiste se revendiquant « quêteuse, mendiante de la vie » et un petit ensemble de croix sobrement peintes qui remémorent sous forme d’installation, un parcours exigeant et escarpé, depuis sa naissance à Taïwan, jusqu’à son accomplissement actuel dans la branche contemplative de la Congrégation des Sœurs de Notre-Dame de Sion depuis 1965, entre Evry et Strasbourg, où se trouve l’atelier.

« L’invisible des tableaux de couleurs et le visible des fusains ne font qu’un »

Extraits d’une œuvre de 350 pièces, dont une partie a déjà été exposée au Parlement européen en 2015, l’artiste a souhaité répartir sur les murs de pierre brute de la nef de Rosheim, d’un côté, des visages au fusain qui personnifient dans un rapport frontal et réaliste la gravité, la douleur et le dénuement et, de l’autre côté, des gouaches souvent flamboyantes de pigments minéraux, élégamment encadrées, et qui promènent le regard et l’esprit du motif de la cellule organique végétale, minérale ou architecturale jusqu’aux ombres et lumières des harmoniques de l’abstraction. Au lieu d’un simple titre, dialoguant avec le tableau, chaque cartel présente une citation de l’encyclique Laudato si’ du Pape François, des Psaumes et des écrivains et artistes Rabindranath Tagore et François Cheng. De quoi enrichir simultanément notre perception de l’art, de l’homme et du monde.

Artiste accomplie et contemplative : « une veilleuse en plein vent »3

Sœur Marie-François Lin, à plus de quatre-vingts ans4 et par son travail quotidien de huit heures et plus par jour dans son atelier du couvent, La Solitude, est l’incarnation d’un syncrétisme entre civilisations d’Orient et d’Occident, entre techniques ancestrales de plusieurs écoles chinoises de dessin, de calligraphie et de peinture et pratiques artistiques contemporaines en évolution autour des mêmes matériaux depuis quelques décennies (gouaches, pigments, fusain, encre de chine, huile sur bois). Sa vision de l’art et du sacré mérite que l’on s’attarde sur cette pensée prononcée dans la nef avec un timbre de voix assez envoûtant, pour accompagner la quinzaine de « Reflets de la Création » sélectionnés pour l’exposition : « Depuis ma plus jeune enfance, j’ai soif du Beau … le mystère du Beau me poursuit […] et me pousse à m’exprimer par la peinture. Cependant, j’affirme que la Beauté n’est pas l’Art et pour moi l’Art ne peut pas être sacré … De même, il ne faut pas confondre Dieu et la religion … Dieu dépasse la religion, Dieu est unique, il est au-dessus de toutes les religions. »

A la croisée des chemins entre Orient et Occident, entre homme et Dieu

Le vernissage du 14 juin n’a pas seulement donné lieu à l’inauguration de l’exposition, sous l’égide des représentants du diocèse, de la municipalité, de la fabrique et des organisateurs, mais il a permis à la créatrice d’y faire passer ce qu’elle a elle-même évoqué comme « le souffle » de la vie et de l’essentiel. Pour cette artiste contemplative « La croix permet de transcender l’obstacle de la rencontre. […] La Croix …de haut en bas se rejoint …n’oublions pas que nous ne sommes pas les maîtres de la Vie. La Croix … de droite à gauche…n’oublions pas que nous ne sommes pas seuls …nous pouvons compter les uns sur les autres. »

 

D’une femme, fluette à la chinoise, en tension comme une toile en trois dimensions sous son voile et son sarrau de sœur et de peintre, émane une grande âme, dispensatrice généreuse d’amour et de cette abstraction qu’elle appelle le concret : l’invisible au-delà du visible, qui devient visible. A rencontrer donc et à découvrir : un phénomène qui nous propulse dans un monde d’intensités particulières grâce à une sorte de « voyageuse intersidérale »5.

Pascale Harlez.

 

Rencontres avec l’artiste à Rosheim en l’église romane :

Dimanche 9 juillet à 18h

Samedi 26 et mercredi 30 août, samedi 23 et mercredi 27 septembre, de 16h à 18h : permanence et dédicace.

Contact / Attachée artistique : Sandrine Bathilde sbathilde.nds@wanadoo.fr

Notes :

  1. http://www.alsace.catholique.fr/les-services/foi-culture/chemins-dart-sacre/
  2. http://www.rosheim.com/toutes-les-manifestations/F258000957_20eme-chemin-d-art-sacre-en-alsace-rosheim
  3. Ouvrage de l’artiste proposé à la dédicace : Veilleuse en plein vent, Siloë, 2012
  4. Petite biographie : naissance le 10 janvier 1935 à Taïwan sous occupation japonaise, formation de haut niveau en musique, chant et arts plastiques par des professeurs chinois, bouddhiste et saisie à l’âge de 7 ans par la vue de la croix dans un temple protestant, puis, dès 1960, études de 3ème cycle à Madrid en histoire, jusqu’à la vie chrétienne et contemplative dès 1965.

Page Facebook Sr Marie-François Lin

  1. https://soundcloud.com/diocese-alsace/itw-bertrand-schlund-pour-les-chemins-dart-sacre

https://soundcloud.com/diocese-alsace/interview-soeur-marie-francois

Photos ; installations : Pascale Harlez ; Pierre-Grégoire Wibaux

 

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