Le temps est venu, 72 ans après la fin de la 2°guerre mondiale, de réorganiser notre Union Européenne. Mais dans quel contexte ? Jean-Pierre Guth de EUROPE AVENIR
L’Union Européenne a été construite après-guerre sur une idée simple : si l’on veut pérenniser la paix à l’intérieur de l’Europe entre ces nations qui se sont étripées pendant des siècles, amenons-les à échanger et s’interpénétrer en travaillant ensemble. Construisons une union économique.
ET CET OBJECTIF EST ATTEINT ! Erasmus a fait circuler les étudiants entre les pays et ils se sont souvent mariés à l’étranger ; les travailleurs et l’argent circulent ; les banques comme toutes les entreprises se sont développées à l’étranger, la PAC et les financements européens de projets ont contribué au développement,…Et l’Union Européenne est devenue la première puissance économique du monde, l’euro est la deuxième monnaie de réserve du FMI, et surtout, surtout, ce qui ne s’était jamais vu : pendant plus de 70 ans, les pays concernés n’ont pas été en guerre les uns contre les autres !
Mais le projet implicite était plus ambitieux encore : les liens deviendraient alors si forts entre les pays que l’unité politique se ferait tout naturellement. Ceci fut inscrit dans les préambules, mais pas dans les coeurs…et encore moins dans l’action. Les dirigeants des pays réunis en Conseil Européen ont accaparé le pouvoir, défendu leurs intérêts nationaux ; les pays se sont livrés à des concurrences fiscales et sociales qui leur ont fait oublier l’esprit de solidarité initial ; la Commission ayant comme seule ligne politique le libéralisme économique, a travaillé technocratiquement.
Quant au Parlement croupion, seul organe européen élu, il ne peut qu’entériner les décisions préparées à l’instigation du Conseil et sans pouvoir proposer de lois ! Alors, devant l’incurie de l’Union face aux problèmes graves que sont le terrorisme et l’insécurité professionnelle, et son incapacité à agir devant les défis modernes, les populations sont déçues par cette Union Européenne à bout de souffle.
L’UE a été créée après la guerre pour ancrer la paix, mais maintenant la menace potentielle n’est plus chez nos voisins devenus nos amis, elle est autour de l’Union : immigration due aux guerres et aux famines, Turquie et tout le Moyen Orient en feu, USA protecteurs devenant concurrents, Chine qui achète nos pays endettés, Russie en déroute économique (son PIB = celui de l’Espagne !) dont Poutine exacerbe le nationalisme….En 70 ans la situation a totalement changé et n’a plus rien à voir avec celle de l’après-guerre ; c’est donc un projet entièrement nouveau qu’il faut donner à l’Union : être une puissance défensive au milieu d’un monde agressif.
Les populations y sont prêtes : à plus de 66% elles ont encore un désir d’Europe : elles veulent garder l’euro, elles se sont habituées aux commodités que leur offre l’Union et ne veulent pas voirdisparaître Erasmus, les subventions, la libre circulation, la PAC pour les uns, le droit de pêche chez les voisins pour les autres.… Elles sentent que l’Union est confortable et elles attendent que l’Union les protège.
Grâce aux accords franco-britanniques de Lancaster House pour oeuvrer ensemble pendant 50 ans au maintien d’une force nucléaire, l’Europe a une capacité de dissuasion.
L’Allemagne douchée par la demande de Trump de payer pour sa défense passée(!), change totalement sa stratégie. La France, au carrefour des 27 et de la GB a un rôle majeur à jouer… dès qu’elle aura retrouvé sa crédibilité ! Il est temps maintenant de renverser les objectifs : ce n’est plus un marché commun pour renforcer la paix à l’intérieur de l’Europe qu’il faut organiser mais une EUROPE PUISSANCE pour éviter les guerres autour d’elle.
Jean-Pierre Guth
Note de la rédaction:
Merci accru à l’auteur car on ne parle quasiment jamais des accords de Lancaster House entre UK et France, les deux seules nations disposant de la puissance nucléaire et chacune, d’un siège permanent avec droit de veto au Conseil de Sécurité de l’ONU. Et cette coopération fonctionne très bien , étroitement même et son destin n’est évidemment pas concerné par le Brexit.
Voir notre article sur Médiapart sur ce sujet, il y a quelques mois déjà:
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